V
Compétence du Centre
22. L'expression « compétence du Centre » est
utilisée dans la Convention pour désigner commodément
les limites dans lesquelles les dispositions de la Convention s'appliquent
et celles dans lesquelles les mécanismes du Centre peuvent être
utilisés aux fins de procédures de conciliation et d'arbitrage.
Le chapitre II de la Convention (articles 25-27) traite de la compétence
du Centre.
Consentement
23. Le consentement des parties est la pierre angulaire de la compétence
du Centre. Ce consentement doit être donné par écrit
; une fois donné, il ne peut plus être retiré unilatéralement
(article 25(1)).
24. Le consentement des parties doit avoir été donné
avant que le Centre ne soit saisi (articles 28(3) et 36(3)), mais la Convention
ne contient aucune précision quant à la date à laquelle
le consentement doit être donné. Il peut être donné,
par exemple, dans une disposition d'un accord d'investissement
prévoyant la soumission au Centre des différends auxquels
il pourrait ultérieurement donner lieu, ou dans un compromis concernant
un différend déjà né. La Convention n'exige
pas que le consentement des deux parties soit exprimé dans le même
acte juridique. C'est ainsi qu'un Etat hôte pourrait offrir,
dans le cadre d'une législation destinée à promouvoir
les investissements, de soumettre à la compétence du Centre
les différends résultant de certaines catégories
d'investissements, tandis que l'investisseur pourrait donner
son consentement en acceptant l'offre par écrit.
25. Si le consentement des deux parties est une condition essentielle
à la compétence du Centre, ce consentement ne suffit pas
à lui seul pour qu'un différend tombe sous la compétence
du Centre. Conformément au but de la Convention, la compétence
du Centre est en outre limitée par la nature du différend
et le caractère des parties intéressées.
Nature du différend
26. L'article 25(1) prévoit que les différends doivent
être des « différends d'ordre juridique * * *
qui sont en relation directe avec un investissement ». L'expression
« différends d'ordre juridique » a été
utilisée pour montrer clairement que si les conflits de droit relèvent
de la compétence du Centre, il n'en est pas de même
des simples conflits d'intérêts. Le différend
doit concerner soit l'existence ou l'étendue d'un
droit ou d'une obligation juridique, soit la nature ou l'étendue
des réparations dues pour rupture d'une obligation juridique.
27. Il n'a pas été jugé nécessaire de
définir le terme « investissement », compte tenu du
fait que le consentement des parties constitue une condition essentielle
et compte tenu du mécanisme par lequel les Etats contractants peuvent,
s'ils le désirent, indiquer à l'avance les catégories
de différends qu'ils seraient ou ne seraient pas prêts
à soumettre au Centre (article 25(4)).
Parties au différend
28. Pour qu'un différend relève de la compétence
du Centre, il faut qu'une des parties soit un Etat contractant (ou
une collectivité publique ou un organisme dépendant d'un
Etat contractant) et que l'autre partie soit un « ressortissant
d'un autre Etat contractant ». Ce terme, qui est défini
à l'alinéa (2) de l'article 25, désigne
aussi bien les personnes physiques que les personnes morales.
29. Il convient de noter qu'en vertu de la clause (a) de cet alinéa
(2), une personne physique possédant la nationalité de l'Etat
partie au différend ne sera pas admise à être partie
aux procédures établies sous les auspices du Centre, même
si elle possède en même temps la nationalité d'un
autre Etat. Cette exclusion est absolue et ne peut être écartée
même si l'Etat partie au différend y consent.
30. La clause (b) de l'alinéa (2) de l'article 25 qui
traite des personnes morales est plus souple. Une personne morale ayant
la nationalité de l'Etat partie au différend peut être
partie aux procédures établies sous les auspices du Centre
si l'Etat en question accepte de la considérer comme ressortissante
d'un autre Etat contractant en raison du contrôle exercé
sur elle par des intérêts étrangers.
Notifications par les Etats contractants
31. Bien qu'aucune procédure de conciliation ou d'arbitrage
ne puisse être intentée contre un Etat contractant sans son
consentement et bien qu'il n'existe aucune obligation pour un
Etat contractant de donner son consentement à ces procédures,
on a néanmoins estimé que l'adhésion à
la Convention pourrait être interprétée comme laissant
entendre que les Etats contractants considéreraient favorablement
les demandes d'investisseurs visant à soumettre un différend
au Centre. On a fait remarquer à cet égard qu'il pourrait
y avoir des catégories de différends relatifs aux investissements
que les gouvernements ne jugeraient pas susceptibles d'être
soumis au Centre ou que leur loi nationale leur interdirait de soumettre
au Centre. Pour éviter tout risque de malentendu sur ce point,
l'article 25(4) autorise expressément les Etats contractants
à indiquer au Centre à l'avance, s'ils le désirent,
les catégories de différends qu'ils envisageraient
ou non de soumettre au Centre. Cette disposition précise que la
déclaration par un Etat contractant qu'il envisagerait de
soumettre une certaine catégorie de différends au Centre
serait faite à titre d'information seulement et ne constituerait
pas le consentement requis pour qu'un différend relève
de la compétence du Centre. Bien entendu, une déclaration
excluant certaines catégories de différends ne serait pas
considérée comme une réserve apportée à
la Convention par l'Etat intéressé.
De l'arbitrage comme mode exclusif de règlement
32. On peut présumer que quand un Etat et un investisseur s'entendent
pour recourir à l'arbitrage et ne se réservent pas
le droit de recourir à d'autres modes de règlement
ou n'exigent pas l'épuisement préalable d'autres
voies de recours, l'intention des parties est de recourir à
l'arbitrage à l'exclusion de tout autre mode de règlement.
Cette règle d'interprétation figure expressément
dans la première phrase de l'article 26. Pour qu'il soit
bien clair que l'intention n'est pas de modifier les règles
de droit international concernant l'épuisement des recours
internes, la deuxième phrase reconnaît expressément
aux Etats le droit d'exiger l'épuisement préalable
desdits recours.
Plaintes déposées par l'Etat de
l'investisseur
33. Quand un Etat hôte accepte de soumettre au Centre un différend
avec un investisseur et donne ainsi à l'investisseur accès
direct à une instance internationale, l'investisseur ne devrait
pas pouvoir demander à son Etat d'épouser sa cause
et cet Etat ne devrait pas avoir le droit de le faire. En conséquence,
l'article 27 interdit expressément à un Etat contractant
d'accorder la protection diplomatique ou de formuler une revendication
internationale au sujet d'un différend que l'un de ses
ressortissants et un autre Etat contractant ont consenti à soumettre
ou ont soumis à l'arbitrage dans le cadre de la Convention,
sauf si l'Etat partie au différend refuse de se conformer
à la sentence rendue en l'espèce.